"Un enfant meurt toutes les 6 secondes en Afrique". Aujourd'hui, ça devient banal de nous servir ça au JT avec le sourire, entre un futile fait divers surmédiatisé qui n'a rien à faire là et le transfert du footballeur lambda pour 94 millions d'€ ... Rien que ça!
Un toutes les 6 secondes. On l'a connaît cette tournure de phrase classique après tout, elle revient à chaque fois qu'on aborde la pauvreté meurtrière en Afrique, avec en fond une photo qui fait mal aux yeux : le portrait misérabiliste et déchirant d'un enfant fixant l'objectif, le regard lourd de sens, entouré de mouches, la peau sur les os, gravement rachitique.
Sérieusement, est-ce que ça choque encore des âmes ce genre de constat? Quelqu'un s'alarme-t-il? Le monde ne le savait-il pas déjà? Soyons honnêtes, tout le monde s'en fout. On a les moyens de nourrir toute la planète, la famine n'est donc pas une fatalité, c'est un crime. Ceux qui peuvent changer la donne s'en foutent comme de l'an 36 de ce qui se passe en Afrique, à moins qu'ils aient un quelconque intérêt dans l'histoire. Il n'y a jamais eu de véritables mesures à la hauteur de l'urgence, aucune véritable intention de l'occident à oeuvrer pour la cause la plus noble à mes yeux : sauver des vies.
Et puis s'il on y regarde bien, l'occident n'a pas intérêt à ce que la situation s'améliore. Il y a suffisamment de pays émergents qui viennent déranger le fragile équilibre de l'activité du petit comité restreint que sont les (futures ex) premières puissances économiques mondiales. Pourquoi se mettre plus de bâtons dans les roues?
Se targuer de militer pour les affamés et jouer les humanistes donneurs de leçons, c'est bon pour l'image. Les discours cul-cul la praline, les blablas moralisateurs de faux philanthropes, ça fait bon effet auprès des idiots. Tant que ça ne requiert pas d'actes, on en use et abuse.
Je ne crois pas que l'humanisme sincère, les bonnes intentions, la solidarité (aussi cliché et mielleux que ça puisse paraître) soient absents de nos sociétés, mais celles-ci ont la fâcheuse manie de se concentrer chez ceux qui n'ont aucun poids conséquent dans les décisions de ce monde. Et même à supposer qu'une once d'humanisme, de philanthropie, ou même de pitié gravite l'échelle de la hiérarchie internationale, je fais confiance à la capacité de l'argent et du pouvoir à pervertir, à insensibiliser, à matérialiser n'importe quel esprit pour que celles-ci disparaissent aussitôt.
Les Nations Unies se sont données en 2000 un délai de 15 ans pour atteindre 8 objectifs mondiaux, parmi eux une bonne moitié qui concerne directement l'Afrique :
- Réduire de 2 tiers la mortalité enfantine
- Réduire de moitié la population vivant avec moins de 1$/j
- Réduire de moitié la famine mondiale
- Universaliser l'enseignement primaire
On est à la veille de 2010, 2 tiers du temps accordé passé pour au final ... pas grand chose ...
L'ONU pointe du doigt le contexte économique mondial non favorable comme (soit-disant) principal coupable. Le prétexte est valable depuis au plus tôt 2007, car la crise a tout de même mis du temps à toucher tout le monde ... mais avant 2007, quelle était l'excuse?
Et avant 2000? L'ONU existe depuis 1945 après tout ...